Le Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan (d) applaudi par ses partisans lors de son arrivée au Parlement, le 14 janvier 2014 à Ankara | afp
Le gouvernement turc poursuivait mercredi ses efforts pour apaiser les tensionscréées par sa réforme judiciaire contestée
Mercredi, le ministre de la Justice Bekir Bozdag a rencontré dans la matinée les magistrats du Haut-conseil des juges et des procureurs (HSKY), dont la réforme annoncée suscite depuis plusieurs jours la colère de l'opposition, qui la juge contraire à la Constitution.
Convaincus de sa volonté de remettre la justice au pas, les principaux rivaux du Premier ministre Recep Tayyip Erdogan ont accueilli avec une extrême réserve, voire un franche hostilité sa proposition de geler sous condition son texte de loi.
"Le Premier ministre a proposé de geler son texte au lieu de le retirer", a noté mercredi à l'AFP le vice-président du Parti républicain du peuple (CHP), Faruk Logoglu.
"Le gouvernement est vraiment déterminé à avancer avec sa proposition de contrôler le Haut-conseil des juges et procureurs (HSYK)", a regretté M. Logoglu, répétant que son parti ne discuterait pas d'une réforme tant que le gouvernement n'aurait pas retiré son projet.
L'ultranationaliste Parti pour un mouvement populaire (MHP) a, lui, catégoriquement écarté l'idée-même d'un amendement constitutionnel sur l'organisation judiciaire du pays.
Le premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan (c) à son arrivée au Parlement à Ankara, le 14 janvier 2014
"Une telle intervention aurait pour effet de gêner les institutions judiciaires pour tenter d'étouffer l'enquête en cours", a tranché le vice-président du MHP Oktay Vural.
Malgré ce refus, le vice-Premier ministre Bülent Arinç a répété que son gouvernement était disposé à geler son texte à la stricte condition que l'opposition, qui le juge contraire à la Constitution, accepte le principe d'une réforme.
"Si les trois autres partis (représentés au Parlement) parviennent à un accord d'ici la fin decette semaine, alors la réforme du HSYK sera retirée de notre calendrier", a déclaré mercredi le porte-parole du gouvernement.
Le projet, toujours en cours d'examen mercredi par une commission parlementaire, vise à donner au gouvernement le dernier mot sur toutes les nominations de magistrats par le Haut-conseil, une des plus importantes institutions du pays.
Gül en recours
Malgré son ouverture, M. Erdogan ne semble pas décidé à baisser la garde.
"Nous avons défendu l'indépendance de la justice et procédé à de nombreuses réformes, mais il y a une chose plus importante que l'indépendance de la justice, c'est son impartialité", a lancé le Premier ministre mardi.
Mercredi, la presse a apporté que six nouveaux hauts responsables de la police d'Ankara avait été démis de leurs fonctions. Depuis un mois, plus d'un millier d'officiers de la sûreté nationale ont été congédiés dans une purge sans précédent.
M. Erdogan soupçonne la confrérie du prédicateur musulman Fethullah Gülen, en guerre ouverte contre lui, d'user de son influence dans la police et la justice pour manipuler l'enquête anticorruption en cours pour le déstabiliser à la veille des élections municipales du 30 mars et présidentielle d'août 2014.
Depuis le 17 décembre, plusieurs dizaines de patrons, hommes d'affaires et élus proches du régime ont été inculpés ou incarcérés pour corruption, blanchiment et fraude.
Dans ce climat délétère, le chef de l'Etat Abdullah Gül, réputé proche de la confrérie Gülen, a une nouvelle fois pris ses distances avec le Premier ministre en prônant un changement de politique sur la Syrie. "Je suis favorable à ce que nous procédions à un nouveau calibrage de nos politiques diplomatique et de sécurité", a-t-il lancé.
Comme lors de la fronde antigouvernementale de juin 2013, M. Gül a multiplié les prises de positions modérées depuis un mois pour défendre l'Etat de droit, à contrepied de l'intransigeance et de la fermeté de M. Erdogan.
Au vu des tensions qui agitent la majorité islamo-conservatrice au pouvoir, le président, très apprécié des Américains, est désormais considéré par de nombreux commentateurs comme un recours voire un rival politique du chef du gouvernement.
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